En octobre, la Cour de cassation s’est emparée du sujet des délais, qu’ils soient d’exécution des titres exécutoires, de prescription ou de forclusion.
Trois solutions sont à retenir en la matière :
- Le délai de dix ans pendant lequel l’exécution d’une décision de justice peut être poursuivie court à compter du jour où cette décision constitue un titre exécutoire au sens de l’article L. 111-3, 1° du Code des procédures civiles d’exécution, c’est-à-dire à compter de la notification au débiteur du jugement revêtu de la formule exécutoire.
Par un arrêt du 5 octobre 2023, la Cour de cassation a donc cassé un arrêt de la cour d’appel de Cayenne ayant déclaré prescrite l’action d’un créancier cherchant à faire exécuter un jugement plus de dix après la date de son prononcé sans égard pour la date de sa signification qui doit seule être prise en compte.
Civ. 2e, 5 octobre 2023, n°20-23.523
- Lorsque deux parties sont liées par un contrat-cadre et plusieurs contrats d’application, la question de la prescription des actions en responsabilité entre les parties contractantes, et notamment celles tenant à la durée et au point de départ de la prescription, sont régies par chaque contrat d’application.
Com., 4 octobre 2023, n°22-18.358
- Le point de départ d’un délai de forclusion pour tout recours en garantie contractuellement défini au moment de la connaissance du sinistre par le client commence nécessairement à courir lors de la saisine de la juridiction d’une demande d’indemnisation principale contre le client.
En l’espèce, les salariés d’une société d’ambulances avaient saisi le conseil des prud’hommes en raison d’erreurs dans leurs fiches de paie. Ces fiches de paie étaient rédigées par le cabinet d’expertise comptable en charge d’établir les comptes annuels. La société d’ambulances s’est donc retournée contre son expert-comptable. Le cabinet d’experts-comptables lui a opposé une clause de ses conditions générales d’intervention établissant un délai de forclusion de trois mois « suivant la date à laquelle le client aura eu connaissance du sinistre ».
La Cour de cassation a confirmé l’arrêt d’appel qui avait déclaré la société d’ambulances forclose et irrecevable en ses demandes de dommages-intérêts, en retenant que la date du sinistre était celle où elle avait pris conscience que la faute de l’expert-comptable avait engendré un préjudice (saisine de la juridiction par les salariés) et non celle du jour où elle avait connu l’étendue du préjudice (décision sur le montant de l’indemnisation).
Cette solution fait écho à l’article L. 114-1, alinéa 3, du Code des assurances, qui fixe le point de départ de la prescription biennale en matière de recours en garantie contre un assureur à compter de l’assignation en indemnisation du garant.
La Haute juridiction est incidemment venue confirmer une autre solution ancienne : les juges du fond n’étaient pas tenus d’examiner d’office le caractère abusif de la clause de forclusion litigieuse, la société d’ambulances ayant convenu de la lettre de mission avec le cabinet d’experts-comptables dans un cadre ayant un « rapport directe avec l’activité de la société ».