Cour d’appel de Paris, 4 avril 2024, RG n° 22/19221
Par arrêt du 4 avril 2024, la Cour d’appel de Paris a autorisé la participation à distance d’une partie à une audience d’annulation de sentence en raison de son impossibilité à y participer en personne.
Les faits concernaient une personne physique de nationalité russe (« Mme [Y] ») opposée à l’Etat du Koweït dans un arbitrage CIRDI (mécanisme supplémentaire). Le tribunal arbitral saisi s’étant déclaré incompétent pour connaître du litige, Mme [Y] a alors intenté un recours en annulation devant la Cour d’appel de Paris à l’égard de la sentence.
Mme [Y] a également formulé une demande de comparution et d’assistance à l’audience, en précisant cependant qu’elle souhaitait que cette audition se tienne à distance, et qu’elle puisse en suivre l’intégralité par le biais d’un dispositif de visioconférence depuis le local diplomatique dans lequel elle se trouve au Koweït sans possibilité d’en sortir sauf à faire l’objet d’une mesure d’incarcération immédiate.
Mme [Y] fondait sa demande sur le non-respect du droit au procès équitable au cours de la procédure arbitrale. Ayant été emprisonnée au Koweït au moment du dépôt de la requête d’arbitrage et pendant une partie de la procédure jusqu’à sa libération sous caution, elle n’avait pas pu bénéficier d’un plein accès aux éléments de preuves et à ses conseils durant son incarcération.
L’Etat du Koweït s’est opposé à cette demande au motif, d’une part, que Mme [Y] s’était mise seule dans cette situation, en se réfugiant à l’ambassade de Russie et ne respectant pas les conditions de sa libération sous caution et, d’autre part, que le grief tiré du manquement au bénéfice du procès équitable n’avait pas été soutenu devant le tribunal arbitral.
En premier lieu, la Cour a relevé que, conformément au protocole relatif à la procédure devant la Chambre Internationale de la cour d’appel de Paris (« le Protocole ») auquel les parties avaient adhéré et au « Guide pratique de procédure devant la Chambre commerciale internationale à la Cour d’appel de Paris », le conseiller de la mise en état est compétent pour entendre une telle demande.
Sur la base du Protocole et de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme qui garantit le droit d’une partie à être entendue, la Cour d’appel a décidé d’accorder la demande de participation à distance. La Cour en a également établi précisément les conditions, indiquant notamment que la comparution de Mme [Y] aurait lieu en anglais, par visioconférence depuis le local diplomatique où elle réside actuellement, et qu’elle pourrait être interrogée et répondre qu’en personne aux questions posées, sans pouvoir lire aucun projet.
Cette décision témoigne de la souplesse procédurale permise par la Chambre commerciale internationale de la Cour d’appel de Paris. Au regard de l’usage de plus en plus fréquent de la visioconférence en arbitrage, il n’est pas à exclure que de telles audiences à distance se multiplient.