DISPUTE RESOLUTION BOUTIQUE

La Cour de cassation juge qu’en matière de procédure collective, l’ordonnance d’exequatur tendant à la simple reconnaissance de la créance ne heurte pas l’ordre public international

Cette affaire concerne un arbitrage initié en 2013 par la société Hydro Construction (« Hydro ») contre la société Vergnet. Le 6 mai 2014, les parties sont convenues de suspendre la procédure arbitrale et de soumettre leur litige à un adjudicateur, lequel a rendu une décision non-contraignante en faveur de la société Hydro et condamné la société Vergnet au paiement de 1,68 million d’euros.

Le 30 août 2017, à la suite d’une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la société Vergnet, la société Hydro a déclaré sa créance au passif de cette dernière. Le juge-commissaire a ordonné un sursis à statuer sur cette déclaration dans l’attente d’une décision d’un juge compétent. Parallèlement, la société Hydro a obtenu la reprise de la procédure arbitrale, à l’issue de laquelle l’arbitre unique a rendu une sentence datée du 27 juillet 2020 confirmant la créance de la société Hydro et condamnant la société Vergnet au paiement d’un montant principal d’environ 1 million USD.

La société Hydro a sollicité alors une ordonnance d’exequatur « limité[e] à la reconnaissance de la créance résultant de la sentence arbitrale et sollicité la délivrance d’une expédition revêtue de cette reconnaissance ». Le 15 janvier 2021, le Tribunal judiciaire de Paris a accordé l’exequatur (TJ Paris, 15 janvier 2021, RG 21/00071) et la société Vergnet a interjeté appel.

Par arrêt daté du 28 juin 2022, la Cour d’appel de Paris a infirmé cette ordonnance au motif que la reconnaissance de la sentence méconnaissait de manière caractérisée l’ordre public international français (CA Paris, pôle 5 ch. 16, 28 juin 2022, n° 21/03765). Le juge d’appel était d’avis que l’insertion, même par la seule voie de reconnaissance, dans l’ordre juridique français d’une sentence ordonnant le paiement de sommes dont l’origine était antérieure au jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire heurtait le principe d’arrêt ou de suspension des poursuites individuelles visant à garantir le caractère collectif et égalitaire des procédures collectives.

Dans son arrêt du 15 mai 2024, la Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris en toutes ses dispositions. La Cour de cassation a rappelé que le principe de l’arrêt ou de la suspension des poursuites individuelles, qui relève de l’ordre public international, interdit de conférer à la sentence la force exécutoire d’une décision de condamnation du débiteur. Or, l’exequatur n’étant demandé qu’en vue d’une reconnaissance du montant de la créance établie par la sentence afin de faire reconnaître un droit de créance dans la procédure collective, la Cour de cassation a estimé que l’ordonnance qui déclare la sentence exécutoire uniquement ce qu’elle consacre la créance ne contrevient pas à l’ordre public international, et devait donc être confirmée.

Référence : Cass. civ., 15 mai 2024, n° 23-11.012

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