Par arrêt du 1er octobre 2024, la Cour d’appel de Paris s’est prononcée sur les conditions de respect du principe du contradictoire à l’occasion de l’exécution d’une sentence arbitrale à l’encontre de la Libye.
En l’espèce, le litige opposait la société tunisienne Siba Plast à l’État libyen. Siba Plast avait obtenu une sentence arbitrale le 28 novembre 2014, condamnant la Libye à lui verser 280 millions d’euros au titre de contrats commerciaux conclus en 2012, après une procédure arbitrale ad hoc initiée en Tunisie. En l’absence de participation de la Libye à l’arbitrage, Siba Plast avait obtenu l’exequatur de cette sentence du Tribunal de grande instance de Paris le 6 mars 2017. Elle avait par la suite entrepris diverses mesures d’exécution sur des actifs libyens en France.
La Libye a interjeté appel de l’ordonnance d’exequatur. Elle faisait valoir qu’elle n’aurait découvert l’existence de la sentence qu’à l’occasion des mesures d’exécution. Elle critiquait donc la sentence sur le fondement de l’article 1520-4° du CPC (violation du contradictoire).
La Cour d’appel de Paris lui a donné raison. Elle relève que les adresses auxquelles les notifications relatives à la procédure arbitrale ont été envoyées sont les adresses email tirées de la clause de notice des contrats en cause. Or, d’après la Cour, ces clauses ne peuvent s’appliquer aux notifications relatives à l’arbitrage, en raison de l’autonomie de la clause compromissoire et en l’absence de précisions, dans la clause d’arbitrage elle-même, portant sur les notifications.
L’autonomie de la clause d’arbitrage a ainsi pour conséquence, paradoxale, de soumettre l’arbitrage à un formalisme plus strict que le formalisme du contrat lui-même.
Au-delà de cette considération abstraite, l’arrêt invite à la prudence dans les notifications internationales relatives aux arbitrages, parfois traitées avec une excessive légèreté au regard de l’enjeu des procédures mettant en présence des Etats étrangers.
Cour d’appel de Paris, Pôle 5 chambre 16, 1er octobre 2024, n° 21-11112.