Par trois arrêts en date du 29 novembre 2023 reprenant une motivation identique, la Cour de cassation a expressément abandonné le principe jurisprudentiel selon lequel pour qu’un acte soit réputé avoir été signé par une société en formation il devait nécessairement indiquer avoir été conclu « au nom ou pour le compte » de la société en formation.
Dorénavant, le juge appréciera « souverainement, par un examen de l’ensemble des circonstances, tant intrinsèques à l’acte qu’extrinsèques, si la commune intention des parties n’était pas que l’acte soit conclu au nom ou pour le compte de la société en formation […] ».
Ainsi, « nonobstant une rédaction défectueuse », une acquisition ou un bail conclu par la société avant son immatriculation peut être repris par la société une fois immatriculée dans les conditions habituelles (reprise des actes dans les statuts constitutifs, décision ultérieure en assemblée ou mandat donné dans les statuts ou par acte séparé).
Comme l’explique la Cour, la solution précédente s’avérait « produire des effets indésirables en étant parfois utilisée par des parties pour se soustraire à leur engagement » et avait « paradoxalement pour conséquence de fragiliser les entreprises lors de leur démarrage d’activité sous forme sociale au lieu de les protéger, sans toutefois apporter une protection adéquate aux tiers cocontractants, qui en cas d’annulation de l’acte se trouvent dépourvus de tout débiteur ».
Ce revirement est bienvenu en tant qu’il accorde une plus grande déférence à l’intention commune des parties ; il l’est d’autant plus qu’aucun texte n’imposait un formalisme aussi strict que celui requis par la jurisprudence antérieure.
Cass. com., 29 novembre 2023 – n° 22-21.623, 22-12.865, et 22-18.295